vendredi 18 janvier 2013

Pause Café 2

Paris premier froid, boulevard des Capucines. Café de l’Olympia. Heure pleine avant le concert. Heure creuse avant ton arrivée. Tu n’es pas en retard, je patiente, un demi posé sur le comptoir, coincée entre les épaules d’un homme et le sac d’une dame aux angles de cuirs bien durs pointés à hauteur de ma hanche. Ça chatouille, je me tortille. Le sac s’efface, les épaules de l’homme ne bougent pas. Je sirote ma première gorgée de bière. La fameuse. Parfums de trèfle, de sudation, de pollen et de copeau de bois. La salle est bondée, les odeurs tambourinent sous mon nez. Toc, toc, on veut entrer, se faufiler et glisser entre les plis ; être analysés et soigneusement répartis. S’entasser aux rayons sauces et graillons, dégoter une petite case aux nouveautés eaux de toilette et s’épanouir à l’espace phénomènes de société. Toc, toc, on veut entrer ! J’hésite. Je préfère savourer ma bière. Les molécules impatientes insistent, gratte à l’huis et tentent un nouvel assaut lorsque je détache le nez de mon verre. On se calme les filles ! J’agite la main et provoque un tourbillon invisible autour de mon visage, j’imagine les ondes, vaguelettes ordonnées, éparpillant au loin les molécules impertinentes, mais c’est peine perdue, car ma curiosité toujours plus forte les voici qui rappliquent aussi sec et, j’accepte, bienheureuse victime, d’ouvrir finalement les vannes. Les odeurs sont emmaillotées, serrées comme pelote de laine. Grondement olfactif. Rumeur amère. Conversation cacophonique de mille molécules qui s’égosillent ou bourdonnent en chœur. Je trace un axe sur le paper-board de ma mémoire sur lequel je glisse le nuage odorant. J’épingle les signes pertinents et j’écarte les interférences. Je m’amuse à identifier la fadeur poivrée, alliacée, d’un sandwich pâté cornichon, celle aigrelette et soufrée d’un cantal beurre qui accolé au parfum miellé de la bière clignote sperme, celle grinçante d’un petit ballon de rouge, poussiéreuse d’un quart Vittel, sirupeuse confit-de-bois d’un porto presque noir, je capte un poc artificiel et je repousse le miasme conventionnel, tenace et métallique du désinfectant qui se faufile depuis les toilettes reléguées au sous-sol. Soudain, mon nuage aromatique se volatilise : le son supplante l’odeur. Un serveur gueule « attention chaud devant !» et passe derrière un couple, un plateau, en bout de bras au-dessus de sa tête, posé en équilibre sur ses doigts distendus. Au sommet, le Perrier lâche des gaz et disperse sur la foule des saveurs ludiques de menthe mêlée au rhum Baccardi. Je replonge et j’inspire la flaveur rassurante des tranches de pain frais tapissées de rondelles de saucisson. Je m’aperçois que ces dernières possèdent un relent commun avec les pêches en boite. Thé Lipton, odeur du foin après la pluie : pisseux et aigre. Café, odeur du cirage à chaussures et des cendres chaudes. Vaisselle rapide dans une eau grise au fumet de vieux ragoût, une lichette citronnelle de liquide décapant, une éponge flasque, insipide et rance. Va-et-vient. Courant d’air frisquet de la porte qui s’ouvre sur la rue. Automne. Premier marron chaud farineux et maïs grillé caramélisé. La porte se referme. Odeur chien-mouillé d’un croque-monsieur. Orange pressée. Chocolat chaud et lait bouilli maintes fois. Foule tumultueuse du soir. Parfums messager. Chypre et Oriental. Ce n’est pas un concert nouveau-jeune, mais bobos quarantenaires. Cologne et fougère. Tiens, au-delà de cinquante ans également. L’heure tourne, les arômes de mangeailles augmentent, basculent paisiblement en tonalités aiguës. Fromage fondu. Jambon chaud. Bière et vin blanc. J’éprouve la sensation d’évoluer dans un cours de danse au cœur de l’effort. Parfum de chaussons fatigués, de corps échauffés et concentrés, de linges et de cheveux moites. Un truc moelleux et réconfortant. J’en oublierai que mes pieds effleurent le sol tandis que mon corps est irrésistiblement hissé, comprimé par les piliers de bar de plus en plus nombreux….







5 commentaires:

  1. Navré NLR, en bricolant mon couper/coller votre commentaire précedent à été broyé par le système...j'espère que vous ne m'en voudrez pas ;))

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  2. Pas le moins du monde, ce sont des choses qui arrivent. (Bon, on essaie de faire en sorte qu'elles arrivent le moins souvent possible malgré les crocs terribles du "système" ;) Je m'étais amusé autour de votre expression "odeur de chien mouillé de croque-monsieur", etc.

    En revanche je vous ai adressé un mail ce matin, je ne sais pas si vous l'avez reçu (sur nezen).

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  3. J'ai bien reçu votre mail. Je vous réponds entre deux formules ;))

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