Depuis ma douce enfance (oui, oui, forcément notre enfance est douce et tendre en général), j’ai le désir d’une boîte à crayons. Mais pas n’importe laquelle.
Tout d’abord elle est très belle. Longue. Rectangulaire. En métal, avec sur son couvercle une magnifique photo d’une montagne Suisse célèbre, dont je ne me rappelle plus le nom. C’est étrange comme les superlatifs viennent à la bouche des enfants, quand ils souhaitent viscéralement posséder un truc super top génial délirant qu’un adulte n’a pas idée !
Bref, cette montagne, je ne sais par quel hasard d’érosion, s’est prit un coup de rabot sur le nez. De beaux alpages l’entourent comme un ravissant collier émeraude. Quelques chalets en bois. En tendant l’oreille je pouvais même entendre les grosses cloches des vaches paisibles, tintinnabuler dans les prés en contrebas. Non, je n’ai jamais aperçu la marmotte et son papier d’aluminium…ni le chocolat, hélas. Cependant, nez collé à la vitrine du magasin, j’admirai les innombrables nuances de couleurs de ces merveilleux crayons. Baguettes magiques du dessein. Caducée miraculeux de l’inspiration et de l’imagination débridée.
C’est certain, les plus extraordinaires paysages seraient sortis de mes doigts, par le truchement de ces plus beaux crayons de l’univers entier ! Combien de sujets j’ai croqué en rêvant sur cette boîte, combien de gestes déliés j’ai accomplis crayons-de-cette-boîte, à la main. Et couronnement de mes aspirations les plus audacieuses, je m’imaginais choisissant un pinceau, affûté comme une épine, que j’humectais de quelques gouttes d’eau et, sous la trace humide, les hachures du crayon se transformaient comme par enchantement, en flaques de couleurs, en nuages évanescents, en filaments de soie…
Des crayons capables de se diluer à l’eau. Des « transformers » sans fusés, ni écrous, pour le doux et paisible bonheur de jouer à l’aquarelle. C’était peut être cela le danger. Chambouler ma chambre en patinoire ?! Encourager la performance créative des enfants rencontre certaines limites, comme le désir d’éviter un dégât des eaux et jouets, dans la chambre que je partageai avec mon frère, mécano du légo. La boîte-à-crayons est restée, toujours sagement, dans sa vitrine.
Les années sont passées. Je suis une grande fille maintenant. Et la semaine dernière, en veine d’inventivité, j'ai flâné au BHV, dans le rayon papiers, cahiers, stylos, peintures. Pour le plaisir de déambuler, et d’imaginer tout ce que je ne ferai pas. Faute de temps, de talents, et de places pour stocker tout ce fourbis ! Puis je suis tombée nez à nez avec, ma-boite-à-crayons. Elle n’a pas changée. Toujours la même photo carte postale de la Suisse en chocolat ! J’ai pris la plus grosse boîte entre mes mains, heureuse, et percutée par tout un tas de souvenirs agréables. Je l’ai retournée, et j’ai compris en regardant son dos offert, pourquoi mes parents n’avaient jamais franchis le pas : gloup ! Fichtre, mais c’est terriblement très cher !! Tien, l’emploi des superlatifs glisse sur de nouveaux sujets de préoccupation avec l’âge adulte.
Mais voilà. J’ai franchi un petit pas.
J’écris ces quelques lignes, le nez posé avec un bonheur de petite fille sur ma petite-boite-à-18-crayons Caran d’Ache.
Et j’ai découvert un cadeau inattendu : l’odeur des couleurs.
Grasse et boisée.
Amère et granuleuse.
Effluve savoureux, sensuel, masculin, étrangement fruité (entre la pêche jaune et la framboise) et pourtant âpre, du bois de Cèdre dont sont élaborés les crayons.
Odeur complexe des pigments colorés, où je perçois une pointe de piment d’Espelette et, un arôme d’huile d’olive fleurie, très légèrement salé.
Remugle métallique à peine acide, de la boîte
...aucune trace de chocolat.
Tout d’abord elle est très belle. Longue. Rectangulaire. En métal, avec sur son couvercle une magnifique photo d’une montagne Suisse célèbre, dont je ne me rappelle plus le nom. C’est étrange comme les superlatifs viennent à la bouche des enfants, quand ils souhaitent viscéralement posséder un truc super top génial délirant qu’un adulte n’a pas idée !
Bref, cette montagne, je ne sais par quel hasard d’érosion, s’est prit un coup de rabot sur le nez. De beaux alpages l’entourent comme un ravissant collier émeraude. Quelques chalets en bois. En tendant l’oreille je pouvais même entendre les grosses cloches des vaches paisibles, tintinnabuler dans les prés en contrebas. Non, je n’ai jamais aperçu la marmotte et son papier d’aluminium…ni le chocolat, hélas. Cependant, nez collé à la vitrine du magasin, j’admirai les innombrables nuances de couleurs de ces merveilleux crayons. Baguettes magiques du dessein. Caducée miraculeux de l’inspiration et de l’imagination débridée.
C’est certain, les plus extraordinaires paysages seraient sortis de mes doigts, par le truchement de ces plus beaux crayons de l’univers entier ! Combien de sujets j’ai croqué en rêvant sur cette boîte, combien de gestes déliés j’ai accomplis crayons-de-cette-boîte, à la main. Et couronnement de mes aspirations les plus audacieuses, je m’imaginais choisissant un pinceau, affûté comme une épine, que j’humectais de quelques gouttes d’eau et, sous la trace humide, les hachures du crayon se transformaient comme par enchantement, en flaques de couleurs, en nuages évanescents, en filaments de soie…
Des crayons capables de se diluer à l’eau. Des « transformers » sans fusés, ni écrous, pour le doux et paisible bonheur de jouer à l’aquarelle. C’était peut être cela le danger. Chambouler ma chambre en patinoire ?! Encourager la performance créative des enfants rencontre certaines limites, comme le désir d’éviter un dégât des eaux et jouets, dans la chambre que je partageai avec mon frère, mécano du légo. La boîte-à-crayons est restée, toujours sagement, dans sa vitrine.
Les années sont passées. Je suis une grande fille maintenant. Et la semaine dernière, en veine d’inventivité, j'ai flâné au BHV, dans le rayon papiers, cahiers, stylos, peintures. Pour le plaisir de déambuler, et d’imaginer tout ce que je ne ferai pas. Faute de temps, de talents, et de places pour stocker tout ce fourbis ! Puis je suis tombée nez à nez avec, ma-boite-à-crayons. Elle n’a pas changée. Toujours la même photo carte postale de la Suisse en chocolat ! J’ai pris la plus grosse boîte entre mes mains, heureuse, et percutée par tout un tas de souvenirs agréables. Je l’ai retournée, et j’ai compris en regardant son dos offert, pourquoi mes parents n’avaient jamais franchis le pas : gloup ! Fichtre, mais c’est terriblement très cher !! Tien, l’emploi des superlatifs glisse sur de nouveaux sujets de préoccupation avec l’âge adulte.
Mais voilà. J’ai franchi un petit pas.
J’écris ces quelques lignes, le nez posé avec un bonheur de petite fille sur ma petite-boite-à-18-crayons Caran d’Ache.
Et j’ai découvert un cadeau inattendu : l’odeur des couleurs.
Grasse et boisée.
Amère et granuleuse.
Effluve savoureux, sensuel, masculin, étrangement fruité (entre la pêche jaune et la framboise) et pourtant âpre, du bois de Cèdre dont sont élaborés les crayons.
Odeur complexe des pigments colorés, où je perçois une pointe de piment d’Espelette et, un arôme d’huile d’olive fleurie, très légèrement salé.
Remugle métallique à peine acide, de la boîte
...aucune trace de chocolat.